samedi 3 octobre

dimanche 11 octobre 2020, par Caroline Lanos

« Dix mots vous sont proposés ici, comme autant d’invitations au voyage, à la réflexion, au plaisir, à la poésie… Laissez-vous porter par le souffle de votre imagination ! »

Aile (nom)
Allure (nom)
Buller (verbe)
Chambre à air (nom)
Décoller (verbe)
Éolien (adjectif)
Foehn (nom)
Fragrance (nom)
Insuffler (verbe)
Vaporeux (adjectif)

Il est petit malingre, on pourrait le prendre pour un étranger, déjà à lui-même.
Après plusieurs années à se chercher, à buller, à errer dans une région sans mer,
sans attrait particulier. Il a répondu à l’appel du large. Des sirènes lui auraient insufflé de quitter le nid. Des ailes lui poussent. Il n’avait pas pensé que le goût du voyage l’aurait fait décoller ainsi. Il découvre des moiteurs insoupçonnées, le nom des étoiles, sous les dunes, l’eau des oasis. Il découvre des odeurs, il pense à les noter :
décline chaque flagrance, y associe des tissus plutôt vaporeux.
Il change d’allure à mesure de ses voyages : Il se rend compte qu’il parcourt d’abord son propre territoire. Il refait surface à lui-même, après une éclipse sous les tropiques ; sur les cartes il note les fronts et courants éoliens qui portent des noms de brigands
ou de pirates. Il redevient l’enfant des bords de route et des chemins creux,
au pied de son vélo crevé...
La chambre à air fait des bulles dans l’eau de la bassine de la tante Nine,
petites bulles qui chatouillent et lui ouvrent d’autres terrains à bâtir, d’autres chemins.
Devenu cartographe, ce grand petit homme signe désormais du nom de Föhn,
Martin Föhn.

Stéphane

Aujourd’hui, le pigeon n’a pas pu déployer ses ailes, il a le souffle coupé, une allure de pigeon ordinaire, lui qui jadis fût un grand pigeon voyageur.

Décoller de la terre, traverser les mers pour déposer des bijoux sur le coeur des gens fût sa destinée. Insuffler la fragrance du bonheur dans le corps des hommes l’a vidé de son propre petit corps maigre à présent.

Il ne sait plus voler tout comme la chambre à air percée qui met le vélo au fossé. Il peine dans le Foehn qui soulève ses plumes bleues pour l’encourager à prendre l’air.

Son corps frêle et vaporeux piétine le sol dans ce champ (chant) éolien qui envoie son souffle à l’oiseau, pourtant ses ailes restent sourdes à l’appel.

Buller sera son nouveau destin.

Laurence

Viens buller sous mon aile
insuffler des fragrances
souvenirs de vacances
Décollons dans le Foehn
du matin vaporeux
Un voyage éolien
à l’allure d’épopée
Dans une chambre à l’air
aux murs effilochés

Caroline

Voyage Voyage

je m’en vais le dimanche à Orly
Voir décoller des avions pour tous les pays
j’ entends les Boeing quand je fais mine de buller
dans ma chambre à air compressé
glissent des ailes dans les hauteurs
plus loin que la nuit et qu’ l’équateur
plus loin que les nuages
largement au-dessus des marécages
Voyage Voyage
Je m’en vais le dimanche à Orly
Voir décoller des avions pour tous les pays
au-dessus d’Paris au dessus du Gange
de Saïgon à Djibouti jusqu’à Florange
au-dessus des guerres embarbelées
du Sahara et du Mali du monde entier
mode éolien harpes du vent
sous le foehn d’Autriche sous l’harmattan
Voyage Voyage
Je m’en vais le dimanche à Orly
Voir décoller des avions pour tous les pays
sous le sirocco les vents de sable les vents d’autan
les vaporeux les sirupeux les tournoyants
pour qu’ils m’ insufflent un nouveau souffle
rien qui me boursoufle ou qui m’essouffle
loin de mes peurs en folle allure en élégance
dans l’enthousiasme de tas d’ fragrances
Voyage Voyage
Je m’en vais le dimanche à Orly
Voir décoller des avions pour tous les pays

Jacqueline

Non mais tu as vu cette allure ? Et cette tignasse noire comme une aile de corbeau ! Et cette robe, on dirait un sac à patates, avec deux trous pour les bras, quoi ? Tu n’es pas d’accord, toi tu trouves ça joli, élégant, tu dis que c’est du tulle, que c’est léger, vaporeux, ah bon, depuis quand t’y connais-tu en tissus toi ? 
Et maintenant tu vas me dire que tu la trouves jolie cette fille ? Elle a les yeux verts ? Peut-être, je n’avais pas remarqué, tu dis d’une belle eau de pierre précieuse, eh bien tu deviens poète mon ami et quoi ? Tu adores la délicate fragrance qui l’entoure, vraiment tu ne peux pas dire parfum comme tout le monde, et je ne te savais pas un sens olfactif aussi développé, tu m’épates avec ton mélange de vanille et d’amande douce.
Sais-tu qu’on dit qu’elle passe son temps à buller toute la sainte journée lovée dans une chambre à air ? Elle s’installe en haut sur la colline et avec le vent qui siffle en ce moment, elle va finir par décoller un de ces jours, notre fœhn ne plaisante pas et avec son tulle, ce sera un joli tableau.
Ça ne te fait pas rire, tu dis qu’elle ne fait pas rien, qu’elle travaille, que c’est une érudite, qu’elle étudie l’éolien, ah bon et c’est quoi l’éolien ? Du grec ancien, tu m’en diras tant, tu en connais des choses, on dirait qu’elle te fait tourner la tête cette fille, tu hausses les épaules mais je vois bien que tu rougis... 
Arrête de marmonner, je ne comprends rien.... Quoi ? Elle t’a insufflé le désir d’étudier et tu veux reprendre tes études ? Alors là je ne sais plus quoi dire, je crois qu’il vaut mieux rentrer, il est midi, il ne faut pas être en retard, tu sais bien qu’ils n’aiment pas ça à l’EHPAD et aujourd’hui c’est jour de hachis.

Roselyne