Jeudi 10 novembre 2022 dans les salons de l’Audace.

lundi 28 novembre 2022, par Jacqueline Mottais

Il me semble avoir déjà parlé du chiffre 7 et de ses vertus magiques. Alors, ce soir, autour de la table ronde, sept lectrices « chargées », on peut dire cela, de livres : leurs coups de cœur du mois d’octobre.

Arlette, Thérèse, Jacinte, Geneviève, Marie-Agnès, Antoinette et moi avec mon livre de brouillon et mon stylo.
L’honneur de la parole est à Arlette, la conteuse, qui nous régale toujours de ses aventures littéraires extraordinaires en pleine Nature. Elle a lu en trois jours, le livre de Pete From, Indian Creek. Aux éditions Gallmeister. Un roman autobiographique dans lequel, l’écrivain raconte son expérience de la solitude en plein cœur des montagnes Rocheuses. Il a 20 ans, en étude à l’université de Montana, il apprend, à la « cafet », que l’office de surveillance de la chasse et de la pêche recherche un employé pour prendre soin de 2 millions et demi d’ œufs de saumons, pendant l’hiver.
Un hymne aux grands espaces sauvages. Des gardes, une tente, Pete seul, pour sept mois à venir, dans le froid et la neige, de la débrouillardise, de l’innocence aussi, un téléphone à des kilomètres…200 dollars par mois, - 35° , - 40°, des pièges à poser pour éviter la déprime… Le décor se plante au fur et à mesure du captivant et détaillé récit d’Arlette. On y est.

Deux coups de coeur pour Geneviève, d’abord Le parfum des fleurs la nuit de Leïla Slimani écrit pour la collection Ma nuit au Musée aux éditions Stocks. Une balade intérieure nocturnale au musée des douanes à Venise, La Punta Dogana dit-on là-bas. Un livre court mais profond, un confinement remarquable, une envolée sur l’écriture, la création artistique, un livre rempli de la vie des disparus qui rejoignent Leïla dans ses déambulations. Un hymne à la liberté dit Geneviève que ce livre a bouleversée.
Ensuite : La poésie sauvera le monde de Jean-Pierre Siméoni. Il est temps de restituer à notre monde en folie la parole des poètes pour sortir des conformismes, pour rêver, désobéir, pour s’insurger. Un vrai « Manifeste » pour une résurrection de la Vie simple et juste humaine. Vous le trouverez aux éditions Le Passeur.

« Nous sommes encadrés d’invisibles, explique Thérèse. Elle vient de terminer la lecture de « Vivre avec l’invisible » de Marie de Hennezel, psychologue et psychanalyste qui relate son expérience auprès de personne en fin de vie.
Notre relation à l’invisible est essentielle. Qui n’a ressenti la présence des parents, frères ou sœurs disparus. Quels sont ces rapports morts/vivants. Personnellement, je ne sais pas « faire mon deuil » Je ne comprends pas le sens de cette expression. Il faut parler des morts pour qu’ils restent parmi nous. Autant de questions que pose Marie. Elles nous interpellent fortement dans cette société où l’on enferme la vieillesse pour ne pas la voir, elle dérange, où on ne sait plus se vêtir dignement pour une cérémonie d’obsèques qu’elle soit religieuse ou laïque.

La poésie va toujours bien à Jacinte qui se joint à l’auteur François Cheng dans « Une Longue route pour m’unir au chant Français ». Un livre autobiographique aux éditions Albin Michel. La vie de cet académicien sage, souriant, à la parole juste, fut un incroyable parcours, une plongée due à l’exil dans un monde et un système de pensée radicalement éloigné de celui de sa terre natale, la Chine. L’apprentissage du Français pour ce Chinois, si jeune et en plein désarroi fait partie de cette longue route faite de patience et d’exigences qui le conduit à l ’amour de la langue et de la culture françaises, à la poésie dès l’âge de 15ans. Une grande et belle aventure de la « Vie Ouverte » toujours en devenir.

Juliette Drouet née Gauvin de Florence Naugrette aux éditions Flammarion se trouve dans une des mains de Marie-Agnès. C’est l’histoire d’une orpheline devenue une actrice en vue qui abandonne tout pour suivre Victor Hugo l’écrivain célèbre du XIXème siècle. Deuils, gloire, trahison, exil et voyages, passion, frustrations, tromperies et réconciliations, voilà la vie d’un couple illégitime qui inventa l’amour libre dans les débuts du romantisme, au milieu d’un siècle de révolutions, de marche vers la République. Juliette observe, collabore, soutient, copie. Juliette exceptionnellement libre, loin de la servitude trop vite et trop souvent attribuée. Une chance pour Victor Hugo d’avoir rencontrée cette jeune fougeraise dont on s’enorgueillit.
Dans l’autre main de Marier-Agnès, Tout peut s’oublier écrit par Olivier Adam aux éditions Flammarion.
(C’est une chanson de Jacques Brel ce titre qui me parle.)
Un drame familial décrit dans ce livre. Le mariage d’une japonaise avec un breton, la naissance d’un fils, l’enlèvement de cet enfant par sa mère qui retourne au Japon. Le désespoir d’un père passionné de cinéma japonais qui va tout tenter pour revoir son fils. A découvrir pour une histoire dure et aussi pour les jolies descriptions des paysages japonais que l’auteur connaît bien.
En fait, il aurait fallu une troisième main à Marie-Agnès pour tenir un conte philosophique de Frantz Olivier-Gisbert dans « Dernier été » aux éditions Gallimard. Où va ce monde martyrisé par la chaleur caniculaire ? Deux personnages, une jeune femme, un vieux monsieur octogénaire, à Marseille, au cercle des nageurs, dans dix ans. Une histoire d’amour et surtout une satire féroce qui dénonce avec humour l’évolution de notre société.

Antoinette a aussi les bras chargés de livres.
« La soupe à la grenade » écrit par Marsha Mehran. ( Edition ?) Trois sœurs quittent l’Iran au moment du retour Des ayatollahs et se retrouvent en Irlande. Que fuient-elles ?
Elles ouvrent un café-restaurant dans un village triste et humide bientôt envoûté des parfums persans, rêveurs et chaleureux. Pour que chacun puisse expérimenter la magie de cette cuisine, chaque chapitre du livre commence ou se termine par une recette. On ne résiste ni au titre, ni à la couverture, ni à ce roman au goût de friandise.
Solak de Caroline Hinault aux éditions du Rouergue. Solak est une presqu’île au nord du cercle polaire arctique. Trois hommes cohabitent difficilement. La tragédie se noue lorsqu’ arrive un troisième homme. Un drame va se produire. Quand ? Comment ? Où ? Pourquoi ?
Marie Sizun, La maison de Bretagne en Folio, le gros coup de coeur d’Antoinette. Claire, la parisienne vient dans le Finistère pour vendre la maison de sa grand-mère qu’elle avait mise en location. Pour elle l’affaire sera rondement menée. Il n’en est rien. Voilà que remontent des souvenirs attachés à ce lieu. Le thème préféré de Marie Sizun, les histoires de famille et une déclaration d’amour à la Bretagne.
Un autre livre de Marie, Plage : une femme sur une plage de Bretagne, attend. Elle attend un homme qui ne viendra pas. Le portrait intime d’une femme d’aujourd’hui.

Me voilà au bout de ce compte-rendu si copieux. Je crains les oublis, les raccourcis, les longueurs et tout ce dont je suis capable.
Une chose est sûre, nous sommes parties, tour à tour, dans des mondes différents, du pôle nord, à la Bretagne en passant par le Japon, Marseille, Venise, les Rocheuses américaines, l’Iran, l’Irlande, la Chine
Pour faire le lien entre tout cela, je vous donne à lire ces vers de François Cheng retrouvés dans Cinq méditations sur la mort autrement dit sur la Vie :

...Mais ce qui a été vécu
sera rêvé
Et ce ce qui a été rêvé
Sera revécu…

JM