Hello my name is...Textes

lundi 8 avril 2019, par Frédérique Niobey

GRAFFEUR

Il s’est toujours préoccupé d’être vivant
Être vivant
Vivant vraiment

TAG à faire attention

Attention à la ville
aux gens dans la ville
à la lumière qui danse
à la musique des sons
à ce qui sent

S’il voulait tout sentir
tout dire
il le savait
fallait faire GRAFF

Et il voulait

Regarde-le
Il marche il traverse
il va droit vers un but
le regard lancé loin
Il sait ce soir où il va

Un autre jour tu le verrais
le pas en suspens
les yeux fouillant l’espace
en cueillette
en maraude
à l’affût

S’imprégner des choses il sait
il laisse venir
il fait l‘éponge
et puis il crache

TAG à voir
Là tout en haut du mur
Son face à face avec le monde a parlé cette nuit
accouché
son auto-graff du jour

longtemps il n’a fait que répéter son blaze
scandé
à longueur de tôle et de béton
J’écris mon nom
Éclaté contourné étiré serré à s’étouffer
J’écris mon nom
Noir rouge blanc explosé de couleurs
J’écris mon nom
J’écris que je suis là
J’écris que je ne veux pas
Comme d’autres avant moi
sur les murs d’Amérique
sur les ponts le métro

Son nom c’était un cri
Un cœur à faire entendre qui battait dans la ville
Et mille autres avec lui

Des jours à arpenter les rues
des jours à froisser des croquis
des nuits de pinceaux et de bombes
toujours faire vite dans la pénombre
plus haut toujours
garder l’équilibre et plaquer la couleur

Laisser un jour son blaze pour d’autres mots
pour un visage
un oiseau
un œil ouvert

TAG à dire ce que tu vois
ce qui est là
qui est beau
qui est doux
qui fait mal ou bien peur
et t’appelle au combat

Je peins donc je fuis
le silence et la cécité
l’acquiescement mercantile
le docile
le facile
le futile

Tu l’entends
Il est de ce monde
Il y tient sa place
Il travaille son regard et sa main

Au pinceau, au rouleau, à l’extincteur, à la scie
il essaime pour toi ses questions dans la ville
ses clins d’œil
ses appels

Que disent ces lettres entrelacées
Ce homard égaré au bord d’un toit
Ce lourd scaphandre jaune

TAG à chercher
Vivant toi aussi

Fais GRAFF

Antoinette

JE PEINS DONC JE SUIS…

Déjà vu. Ailleurs. Hors les murs. En pots de verre transparent sur le rebord de tes fenêtres.
A la place des rideaux.
Tu faisais de tes pinceaux des bouquets. Des roses. Des rouges. Des bleus. Des verts. Des bleu-vert. Des multicolores. Des noirs et des blancs. Des gris d’écume.
Tu peignais. Tu étais.
Tu avances à contre-jour dans un encadrement de reine doré à l’or fin.
Mausolée de pinceaux, de rouleaux, petits et gros. Momifiés.
Rires de fantômes frisottés
Têtes royales guillotinées empalées au bout de piques rigidifiées.
Marche révolutionnaire terrifiante vers un Panthéon d’outils d’artistes assassinés.
Coupes de cheveux à la brosse. Brushing gominés. Indéfrisables et coloration et mises en plis pour coiffage perruqué en éternelle offrande pyramidale et printanière.
Bouilles chiffonnées de jonquilles, de narcisses, de primevères.
Se retiennent d’éclater.
Peaux vérolées de citrons et d’orange.
Raflent la lumière.

Making flowers with used.

Des coulures sanguinolentes de couleurs font leurs écritures. Elles dégoulinent sur un pot-sarcophage blanc, débordent en larmes furtives, timides, sur l’encadrement doré à l’or fin.

Mouvements de mes pensées qui ondulent vers toi

Il faut des milliers de pinceaux pour écrire des poèmes.
La main qui les tient sait tous les sentiments du monde et retentit de ses vibrations.
Le cœur regarde et devine un sourire dans les nouvelles du ciel et la signature des âmes.
Peindre pour aller plus loin que la mort.
Ton nom est dans la cohorte des pinceaux et des rouleaux en potée.
Tu peignais. Tu es. Tu seras.

Your name will be so beautiful !!!

Jacqueline

ART SUBWAY 1

Le bonheur est sorti de la nuit
Il a filé à toute allure
Dans la jungle urbaine
Rugissement de King
Sauvage

Le bonheur s’est coulé
Au sein de la city
Le jour naissant
Effiloche les ombres
Menaçantes

Le bonheur s’est faufilé
En bulles sinueuses
Parmi les tours désolées
Banlieues mosaïques
Farouches

Le bonheur transmute
Les lumières du matin
Lumineuses et magiques
En un graffiti enchanté
Trompeur

Le bonheur tangue
Ondule en vagues puissantes
Pulsations ardentes
Parfums acides
Éphémères

Le bonheur est dans les regards
Il tatoue les corps
Bombe les visages
Tague les cœurs
Chut !
Le bonheur est fragile.

ART SUBWAY 2

Je me sens tout fringant aujourd’hui, c’est sûr, cela va être une journée extraordinaire, ils ont passé une partie de la nuit à me peindre, en catimini, sans bruit, juste quelques chuchotements et rires étouffés, dans des vapeurs piquantes de solvants, et le résultat est magnifique, dans une débauche de couleurs, ils ont écrit « Bonheur ».

Et moi dans quelques instants je vais m’élancer dans la ville et porter haut et fort, à tous ceux qui voudront le voir, ce message ou plutôt j’ai envie de dire cette incitation ou mieux cette formule magique, je me sens l’âme d’un chaman et durant mon périple, mon incantation sera celle bombée sur mes flancs.

Voilà c’est parti, je quitte le dépôt à toute allure dans un rugissement sauvage, je suis le king, une brume matinale, grise et opaque submerge cette jungle urbaine, tout est flou, fantasmagorique, les enseignes lumineuses semblent s’effilocher, les sons de la rue sont étouffés, et les cloches lointaines bourdonnent, plaintives. Comme souvent l’aube sent la désolation mais je ne me fais pas de mouron car nous sommes au début du printemps et bientôt les reflets dorés du soleil feront scintiller mon acier.

J’entre dans ma première gare, tellement froide, les voyageurs m’attendent, frileux, déjà harassés, soudain, un frémissement, des bruissements, un bouillonnement et le ravissement, les silhouettes se redressent, les visages fermés sourient, la grisaille s’est évanouie et les premiers rayons printaniers se sont mis à danser.

Et ce petit prodige s’est poursuivi tout au long de ma tournée, mon « Bonheur » a fait pétiller les yeux, a créer une douce griserie, j’avais dit, n’est-ce- pas, que ce serait une belle journée, elle se termine, le ciel commence à se teinter de rouge, je vais rentrer, on va me mettre sans doute sur une voie de garage le temps de me décaper, encore une fois mais je fais confiance aux tagueurs et graffeurs pour qu’ils continuent à me faire passer d’autres journées extraordinaires.

Roselyne

JE PEINS DONC…..JE BOSS

La liberté, tu peins, Bogoss,
peins sur le train-train quotidien,
peins, c’est comme manger du bon pain,
peins, ça décoince tous tes os.

Soit maudit, l’artiste vandale,
cache-toi de la police locale,
glisse ton pinceau sur le métal,
prends ta position fœtale.

Tu peins ces merveilleux blazes
dans toute la ville, tu erres,
pour combler ce vide sévère,
Sous tes doigts fourmille l’extase.

Là, ton lettrage acide,
peint aux fenêtres torrides,
l’alphabet n’est plus aride,
les visages se dérident.

Your name is so beautiful,
tu peins sur l’indifférence,
tu reçois ta récompense :
sur les gens, les larmes coulent.

Ce bout de bois, tu peins dessus,
vois ses belles lattes qui suent,
vois ces couleurs à corps perdus,
lisse ta peau mise à nu.

Dans ta main douce, une bombe,
un bel oiseau sur la brique,
tu vois ce (chant) (champ) d’acrylique,
en équilibre, tu tombes.

Tes coulures sont du grand art,
elles cachent ton loin désespoir,
tu veilles encore très tard,
afin de devenir star : War.

Laurence B.

DO YOU LIKE ACIDE
TAG ACIDE
PAS ASSI

DO YOU LIKE ACIDE
NIK LA BAC
T’ES ACIDE

DO YOU LIKE ACIDE
SO WHAT
VANDALISTE

DO YOU LIKE ACIDE
INTERDIT
PAS PERMIS

DO YOU LIKE ACIDE
IL EST PAS SI DURTY

DO YOU LIKE ACIDE
DO YOU LIKE ACIDE

OUI
I LIKE ACIDE
LE ONE EXPRESSIF DE DURTY MUSIK

L’ACIDE POUR BIJOUX
DANS LES TRAINS
INTERDIT

Françoise.P.

PROMENADE dans la zone prédéfinie
« Le Graffiti devient œuvre d’art abstrait »
qui commence avec une photo en noir et blanc et
s’achève par une autre photo en noir et blanc.

Depuis la visite de l’exposition « My name is... » samedi 9 février tous les jours ou plutôt toutes les nuits j’y ai pensé, j’ai cherché, je me suis documentée sur la toile. J’ai vu les œuvres de WAR ! de par le monde, son calamar géant qui s’étale sur deux immeubles grecs, sa pieuvre qui rampe dans un sous-sol, son tourteau à Lorient, ses oiseaux : martin-pêcheur, échassier..., ses coquelicots ...
Artiste spécialisé en « PMN », Peinture Monumentale Nocturne, il travaille son dessin en atelier jusqu’à l’apprendre et le maîtriser parfaitement pour pouvoir le reproduire quasiment les yeux fermés, un travail incroyable et magique : quand on découvre une fresque c’est réellement un instant de poésie qu’il nous offre. Il le dit : « je sème des graines de poésie dans le béton de notre époque »
Il est photographié ici en noir et blanc, derrière son camouflage - il reste anonyme -, devant un mur couvert de « BRAVO, MAGNIFIQUE, MERCI SUPER WAR, BEAU, J’ADORE, CHAPEAU, FRENCH BANKSY, MAGIQUE... »
« Laissez-moi un message ! » : WAR ! a été entendu !

De l’atelier à la rue, de la rue à la toile :
les artistes de rue entrent dans les galeries :

SUNSET : Red Diaries
Comme un coucher de soleil flamboyant, en rouge sur noir (non ce n’est pas le rouge et le noir et ce n’est pas en rouge et noir non plus...).
On aimerait déchiffrer les lettres serrées de son journal en rouge sur noir.

En face, NEBAY répète son blase sur la toile, « NEBAY, NEBAY » écrit de toutes les couleurs, jusqu’à ne plus être déchiffrable et devenir abstrait. (entre parenthèses : JCT 100%, nom de son collectif signifie "je cours toujours" !)

Des couleurs, elles jaillissent en profusion dans le « No Way » de SMAT156 ; c’est un enchevêtrement de chemins alambiqués, d’arabesques, de méandres, une cartographie… dans laquelle je suis entrée, explorant l’infiniment petit : une expérience qui pourrait s’intituler « retrouver son chemin », ou pas.
J’avais pris plusieurs photos en gros plan du tableau. Zoom sur une parcelle de la toile. J’agrandis l’image sur mon téléphone. Les traits grossissent, les veines de couleurs sont bien distinctes (un boudin rouge foncé comme un ver de compost en plastique...). J’agrandis encore, les couleurs s’aplatissent, des formes surgissent, d’étranges créatures apparaissent. Je vois une tête jaune aux yeux blancs jaillissant d’un masque noir, avec une femme bleue à la chevelure violette à ses côtés.

Je continue ma navigation et puis hasard ou magie ? Je retombe sur l’image : c’était comme retrouver une aiguille dans une botte de foin ! Mais mon doigt glisse, je quitte la photo, je ne l’ai plus, je l’ai perdue. Je ne l’ai pas retrouvée.

Ensuite je me suis aventurée à faire un découpage dans le mille-feuilles des deux artistes allemands : Patrick Harlt et Christian Hundertmark ; c’est une parcelle située sur la gauche du tableau, en haut qui a retenu mon attention.
Sous une grande descente en glacis orange subsistent une croix et une arabesque blanches comme deux signatures posées sur un millier d’étoiles : c’est alors l’infiniment grand qui apparaît dans ce morceau de « layer cake ». Magie ...

Mon petit tour d’horizon dans ma zone pré-définie s’achève sur une seconde photo en noir et blanc : Retour à la rue sous l’œil du photographe : Nicolas Gzeley a saisi une scène de travail du collectif les « French Kiss » au pied d’un immeuble haussmannien, deux piétons marchent en premier plan, le regard tourné vers la fresque en devenir.

Écriture, peinture, dessins, photos : les images et les mots sont là pour raconter la vie.
Ils sont La Vie.

Et WAR ! écrit : « JE PEINS DONC JE SUIS »

Catherine

FRENCH KISS

Caresse rapide à la surface de la ville
caresses volées
légères
Battements d’aile posés sur la surface lisse et sombre
Dentelle improvisée pour habiller le panneau aveugle qui cache les maisons
et renferme la rue

Végétation luxuriante, enchevêtrement de branches de rameaux d’herbes folles qui dansent au gré des vents,
au gré des corps qui dansent eux aussi
Ballet d’artistes stylisés
mains levées
à bout de bras
laissant apparaître
l’ombre claire d’un cocon végétal protecteur
abris de galaxies, trous noirs et autres objets célestes

Coque de branchages capitonnée d’énergie pure
enveloppante et nourrissante comme magma en fusion
agité de convulsions

Bouche géante qui embrasse tout l’espace

Caroline L.

(SANS TITRE)

L’homme a toujours voulu laisser une trace de son passage sur un lieu précis ou simplement sur terre.
Au début de l’histoire sur les parois des grottes partout dans le monde,
ensuite sur les murs des geôles,
sur le béton des bunkers,
sur les murs érigés pour séparer, empêcher les gens de circuler.
Écrire sa colère quand les bouches sont celées,
exprimer ses revendications quand la foule descend dans les rues.

Mais on peut aussi montrer son talent sur les murs, à tous. Mettre de la couleur dans le gris des villes. Pas besoin de musée, rien à payer, juste regarder, admirer, partager.

Le dessin peut couler, se dissoudre sous la pluie, sous l’effet du temps. On peut l’effacer pour en faire un autre et encore, et encore...

Les murs se construisent mais finissent par s’effriter, se disloquer, tomber... et donner l’espoir , blanc sur noir.
Le dessin éparpillé, déstructuré, mélangé, puzzle inachevé, à recommencer.

Françoise.G.

HELLO MY NAME IS... Sam, and you : your names are Lek and Sowat...

Bonjour ! C’est dimanche,
et je planche, je planche en Z.A.D. :
je planche sur zone, Zone A Décrire.
Et, je sèche littéralement en zone 5.
Tout le monde descend ! Ozone saturé.
Zone 5, noire et blanche.
Touches graphiques,
devant la fresque déconstruite,
je reste dubitative...

Lek et Sowat, princes de la bombe et explorateurs urbains,
vous me suggérez un nouveau voyage au pays de l’Urbex,
amis de la langue "Graffitis".
Au départ de vos voyages urbains, vous aviez colorié moult murs
et contrées abandonnées dans le secret et l’anonymat.
Après vos différentes résidences et rencontres artistiques,
de la Villa Médicis aux entrailles du Palais de Tokyo,
vous vous êtes frottés, ailleurs, séduits par les fresques romaines.
Aujourd’hui comme si, vos graffitis sortaient des murs... ils sont
projetés, incrustés sur placo. Vis et rails. Démantelés, désarticulés.
Une autre langue "Lettrages" blancs sur fond Soulage.
Calligraffitis, œuvre in situ. Ça pose et s’expose d’un autre âge.
Votre A.D.N. de la liberté, artistes plasticiens, vous la façonnez
et vous nous la proposez, brute et viscérale !
Vous redonnez de la noblesse à ces matériaux simples et du quotidien.
En zone 5, ça déménage et ça badigeonne.
Et à nos yeux, bourdonnent l’avalanche d’images.
Vous nous donnez à voir, à changer notre regard.
Du dehors au dedans, l’image en accéléré trouble mon œil.
Votre duo fonctionne et, la construction façon réseaux "résotte",
résonne et nous ravigote. A visages découverts, votre zone affranchie.
Il nous semble mieux vous connaître et nos âmes vagabondent, séduites.

Stéphane.M.