Clôture de l’atelier 2 juin 2018

dimanche 24 juin 2018, par Webmestre

Atelier : « un poème normalement ça parle d’amour » animé par Gwenaëlle Rébillard Textes écrits par Caroline, Nelly, Jacqueline M, Roselyne

Légère tension de l’air
avant le calme à venir
Impression d’immensité, de s’ouvrir au ciel
L’espace s’agrandit alors que
La vision va se rétrécir.
S’activer au jardin avant de ne plus pouvoir
avant de ne plus y voir
L’ultimatum quotidien s’installe tranquillement.
Comme chaque soir d’été
la lucane cerf-volant
me frôle de son vol sonore et maladroit
C’est le signal
elle prend possession des lieux
alors que le jour décline.

Il y avait ce vide abyssal.
La profondeur que le noir impose.
Ligne d’horizon sans horizon
et pourtant, de loin, la plus étendue.
Laissant apparaître,
rêves inaccomplis,
actes laissés en suspens,
tels des stalactites invisibles qui,
de déliquescence en déliquescence,
forment des cours d’eau,
d’où jaillissent des roseaux que,
pas même les tempêtes déracinent.
Nuit opaque d’un calme sans pareil,
jaillissant chaque jour des entrailles de la Terre,
transportant ce que l’humus a gardé,
de plus précieux,
de plus évanescent.

La nuit royalement ne lâche rien, enveloppe les arbres feuillus de l’été de ses écharpes brunes, refuse sa divine place à un jour nouveau, se réjouit de suspendre le temps au croissant de lune qui s’évanouit discrètement sur l’horizon rosi de timidité juvénile . La vie reprend son cours avec le roucoulement des pigeons ou des tourterelles nichées dans les châtaigniers de la haie, les plumes ébouriffées des poules caquetantes en révérence autour d’un coq en pavane glorieuse, le claquement de deux volets de bois contre un mur de granit gris, le trincaillement lointain d’un tracteur matinal remorquant une herse.

La mer et le ciel à l’infini. La clarté blanche, vaporeuse, de ce tout début de journée. Le vent, à peine levé, souffle salé, chiffonne les broussailles, les herbes sèches, le sable rugueux glisse entre les doigts, sablier temporel. Les crêtes des vagues ondulantes frémissent, gémissent pour ceux qui veulent entendre. La brume s’est déchirée, les mouettes dansent, aériennes, les ventres blancs miroitent dans les rayons timides du soleil.

Les cloches de l’église du village égrène leurs douze coups de midi et leur pleine volée s’encampagne par delà les champs, les prés, les bois, les haies touffues de noisetiers sauvages qui abritent les lièvres, par delà les ruisseaux miroitants leurs eaux limpides et babillantes. Soleil-dieu de midi. Sablier sacré. Angélus d’un milieu de jour. Annonce de l’ange à Marie, qui ôte les chapeaux de paille, fige en statues verticales et priantes des corps jeunes ou vieillissants, rompus de fatigue, incline en recueillement des visages rougis, suants, joint des mains calleuses, épargne pour quelques instants des lames aiguisées des faux, les hautes herbes sèches qui offrent au vent passant leurs graines éternelles, se balancent en vagues ondulantes et paisibles.
La maison assoupie, volets clos dans son ombre violette fait la sieste. Les brumes de chaleur rampent, légères, enveloppantes, évanescentes. A l’intérieur une légère odeur de sel, d’algues, de bois brûlés, de menthe et de clous de girofle imprègne l’air. Dehors, les vagues malicieuses se laissent caresser par un souffle coquin, la musique cadencée de leurs tendres roulis bercent les dormeurs. La lumière filtrée, oblique est douce sur les corps apaisés.

Comme un entre-deux
une zone de transition
Mouvement, déplacement,
changement d’espace
La journée est faite
et tout peut commencer
Liberté totale après la journée,
avant la soirée
Un temps pour soi.

 L’illusion de,
l’impression d’avoir,
le doute sur,
la certitude que,
l’envolée reportée ou laissée en chemin.
le silence qui perdure.
Et si le jour avait oublié d’être.
 Alors la nuit.
Oui que vienne la nuit.
Déjà sa robe se dessine,
jamais la même,
légère ou épaisse,
caressante ou rêche,
courte ou longue.
Lumière astrale équivoque.
Fin du jour.

Légère tension de l’air
avant le calme à venir
Impression de plénitude
Le ciel se dévoile
son souffle fraîchit
L’espace s’agrandit alors que
la vision va se rétrécir
La mer est d’huile
elle glisse doucement et presque sans bruit sur le sable mouillé
Marée haute, les puces de mer s’agitent en tout sens
coincées entre l’eau et le muret de pierres
Les poules sont de sortie
et se régalent de ce festin iodé
Le cri du goéland emplit l’espace entre le ciel et l’eau
Il prend possession des lieux alors que le jour décline.

Il y avait ce vide abyssal.
La profondeur que le noir impose.
Avec cette nouvelle ligne d’horizon,
de loin la plus étendue.
Laissant apparaître,
un rêve accompli,
un acte qui était resté en suspens,
et qui,
tel un stalactite invisible,
de déliquescence en déliquescence
a formé à lui seul un cours d’eau
d’où jaillit un roseau que,
pas même les tempêtes déracinent.
 Nuit opaque d’un calme sans pareil,
jaillissant chaque jour des entrailles de la Terre,
transportant ce que l’humus a gardé,
de plus précieux,
de plus évanescent.

Il attend sur le pas de la porte. Dans son poing serré sa casquette. Il s’est levé avec le jour comme à son habitude. Elle a préparé un bol de café brûlant et l’a posé sur le bord de la table recouverte d’une toile cirée beige à carreaux délavés. Il a bu d’un trait avant de sortir. Avec ça dans l’estomac, il tiendra bien jusqu’à l’heure de la collation. Dans l’étable, collée à la pièce de vie, les vaches, les pis gonflés de lait, meuglent leurs impatiences. Elle lave le bol, se dirige vers ses bêtes, un trépied, un seau, un torchon imbibé d’eau de javel, à la main. Le coq a chanté plusieurs fois son hymne matinal au soleil levant. Les poules s’ébrouent de bonheur, satisfaites de leur pontes rosée encore tiède, précieusement déposée dans des nids de paille blonde.
Il attend sur le pas de la porte. Dans son poing serré sa cacsquette. Respire profondément les parfums matinaux qui s’élèvent en nuages de buée depuis la terre que la nuit orageuse n’a pas rafraîchie. Elle transpire la sueur des fronts penchés la veille sur ses sillons.

La mer et le ciel à l’infini. La clarté grise est frangée de brume en ce tout début de journée. Le vent acide, souffle salé, froisse durement les broussailles, les herbes sèches, le sable rugueux glisse entre les doigts, sablier du temps passé. Les crêtes des vagues écumantes tremblent gémissent, chuchotent la journée à venir. Dans la brume déchiquetée, les mouettes balancent, aériennes, leurs ventres blancs, oscillants dans les premiers rayons du soleil.

De l’air coloré rose entre par la fenêtre. Les oiseaux se sont assoupis sans s’en rendre compte. L’orage éclatant a donné des nouvelles du ciel. Le chat est devenu sauvage et roule des éclairs verts dans ses yeux de braise. Ses griffes sont des lames d’acier. Elle essuie la vitre de la porte à double battants avec les pages déchirées du journal de la veille. Il a ôté sa casquette. La transpiration colle ses cheveux. Sa main glisse vers le paquet de gauloises bleues en attente sur la toile cirée beige à carreaux délavés. Ils n’écoutent pas Bach ou Beethoven. Ils ne savent pas la musique et le musiciens. Ils ne savent pas la peinture et les peintres. Ils savent la Terre. Ils savent les arbres et les rivières. Ils savent le blé, le colza, le maïs, les mûriers et les châtaigniers. Ils savent les oiseaux, les renards et les lièvres et les lapins, les saisons. Ils savent le silence qui les unit, léger comme un rayon de lune. Ils savent qu’ils travaillent dans les ténèbres. Ils savent que rien jamais ne les séparera. Ils ont appris à dire sans les mots.

La maison s’est tassée, volets clos dans son ombre violette, elle fait la sieste. Les brumes de chaleur, tels des spectres rampent, pesantes, envahissantes. A l’intérieur une lourde et sèche odeur saline imprègne l’air. Dehors, les vagues fantasques se font fouetter par un souffle mauvais, le roulis tumultueux se fracasse sur les falaises abruptes, troublant le sommeil des dormeurs. Une lumière opaque enveloppe les corps agacés.

Comme un entre-deux, une zone de transition
Mouvements, déplacements, la journée est faite
et l’on va rentrer, saturés de soleil et d’embruns,
incrustés de sables et de cristaux salés,
épuisés de baignades et de joies partagées
Bousculades dans les douches,
embouteillages en cuisine
pendant que d’autres lisent et discutent dans le coin canapé.
Comme un entre-deux
une transition vers le dîner.

Toujours,
l’illusion de,
l’impression d’avoir,
le doute sur,
la certitude que. 
Mais l’envolée non reportée,
non laissée en chemin.
Malgré le silence qui perdure,
le jour n’a pas oublié d’être.
 Alors la nuit.
Oui que vienne la nuit.
Déjà sa robe se dessine,
jamais la même,
légère ou épaisse,
caressante ou rêche,
courte ou longue.
Lumière astrale équivoque.
Fin du jour.
 
Il y avait ce vide abyssal.
La profondeur et le noir qui s’impose.
Formant chaque jour une nouvelle ligne d’horizon,
de loin la plus étendue.
Et laissant apparaître,
des rêves oubliés,
qui étaient restés en suspens,
et qui,
tels des stalactites invisibles,
de déliquescence en déliquescence
ont formés un fleuve de souvenirs
d’où jaillit une force que,
pas même les tempêtes déracinent.
 Nuit opaque d’un calme sans pareil,
jaillissant chaque jour des entrailles de la Terre,
transportant ce que l’âme a gardé,
de plus précieux,
de plus évanescent.
 
Elle est au bord du puits avec ses deux seaux. Lourdes journées d’été . Torrides. Interminables. Déjà, le soleil l’assomme. L’odeur du foin se mêle en cette aurore à la touffeur de la nuit. Elle s’assoit de biais sur la margelle. Ce matin le troupeau est loin, près du petit bois des Landelles. De temps à autre lui parviennent les coups de becs du pivert qui frappe en cadences les troncs ancestraux des châtaigniers. Elle est seule. Elle attend. Rares instants de solitude. Elle ne fait rien. S’absorbe en elle-même, écoute le murmure de la voix de la nature qui s’éveille et l’éveille, qui la surprend, la déconcerte, la trouble et la rassure. Voix connue et inconnue. Voix retrouvée. Voix perdue dans les vallées. Voix d’indulgences et de promesses.

La mer et le ciel à l’infini. Un début de journée morose, cafardeuse. Les rafales de vent, souffle salé, ébranlent, impitoyables les broussailles, les herbes sèches, le sable rugueux tourbillonne, intemporalité. Les crêtes des vagues bouillonnantes vacillent, plaintives, la journée à venir sera bourrasque. Les courants d’air gelés entraînent en un ballet aérien les mouettes aux ventres blancs dans le gris plombé des nues.

La nouvelle a couru par dessus les bois, par dessus les prés, par dessus la Minette qui gargouille son eau claire au fond de la vallée, par dessus les étables et les poulaillers, par dessus les toitures des fermes éparpillées, par dessus les grenier à blé, les gerbières, les écuries, les porcheries, pardessus les jardins potagers et les poireaux fleuris, par dessus les bouquets sur le fenêtres posés, par dessus les bêtes subitement apeurées.
La nouvelle a couru. La nouvelle a couru. Le monde consterné s’est figé.
Ce matin, dans le puits de la Devise, le gars Pierre de la Dauvinière est tombé.
Ce matin, dans le puits de la Devise, le gars Pierre de la Dauviniere s’est noyé.

La maison trapue, blottie, volets clos, protecteurs fait la sieste. Les brumes de chaleur rampent, étouffantes, oppressantes. A l’intérieur une odeur saline, marine, moite, humide imprègne l’air. Dehors, les vagues menaçantes se font cingler par un souffle vengeur, la violence incessante du roulis sur les falaises abruptes affole les dormeurs. L’ombre soudaine inquiète les corps brûlants.

Une fin d’après-midi particulière
celle du dimanche
quand le week-end touche à sa fin
On sent cette fin,
elle est palpable
Elle est chargée de toute la semaine à venir
qui commence à poindre,
à s’installer
à prendre forme
On vit les derniers instants du dimanche qui s’étiole
Une fin de dimanche après-midi
Comme un entre-deux,
une zone de transition.
 
Toujours mais moins fortement,
l’illusion de,
l’impression d’avoir,
le doute sur,
la certitude que.
 L’envolée reportée,
ou laissée en chemin.
Si le silence perdure,
que faire pour que le jour n’oublie pas d’être.
 Arrive la nuit.
Oui que vienne la nuit.
Déjà sa robe se dessine,
Jamais pareille, toujours charnelle,
légère ou épaisse,
caressante ou rêche,
courte ou longue.
Lumière astrale sans équivoque.
Fin du jour.