à partir d’un livre

lundi 18 mai 2015, par Frédérique Niobey

à partir de Je te nous aime de Albane Gellé

"La logique veut que devant moi il y ait une voiture à l’origine du bouchon, la voiture qui en bloque mille autres. Mais évidemment, on ne voit jamais la voiture à l’origine du bouchon. Moi je pense qu’il n’y en a pas.
Comme on est tous bloqués, il y en a qui sortent de leur voiture et qui vont dans le champ. Il n’y a jamais autre chose que des champs autour des autoroutes. Elles rendent notre destination plus proche et pourtant elles sont loin de tout. Tout à l’heure en klaxonnant j’ai fait tomber quelqu’un d’un arbre. Ce n’était pas la première fois, après tout que font-t-il dans les arbres ? Les arbres sont moches autour des autoroutes. N’empêche maintenant je ne klaxonne plus, de toute façon ça ne sert à rien. En plus l’homme dans la voiture devant s’est endormi. La femme à côté de lui lit un livre. Je me demande lequel des deux fait de beaux rêves.
La femme derrière moi sort de sa voiture et s’énerve contre les mouches sur les yeux de chevaux, et contre au moins 900 000 autres choses. Elle s’énerve et ça énerve les gens qui klaxonnent. Les gens klaxonnent et ça m’énerve. De toute façon il n’y a rien d’autre à faire que s’énerver."

Théo

à partir de Howl de Allan Ginsberg
"Je regrette le temps de anges indiens visionnaires.
Aujourd’hui, tout n’est que pensée mécanique.
Les yeux des hommes sont devenus mille fenêtres aveugles.
Tant de mornes cerveaux et d’intellects sabotés,
Pollués par les anges fantômes de la théologie.
Boire une bière à l’œil, fuir la réalité, se taillader les poignets.
Renoncer à devenir vieux, à devenir fou,
Plutôt que d’affronter ce monde
Où l’amour n’est que pétrole et pierres sans fin,
Sous un ciel tuberculeux
Illuminé sur les toits des taudis,
Triste comme une tombe fumante."

Lisa