Jour 34 du Grand Confinement

lundi 20 avril 2020, par Frédérique Niobey

J’ETIRE MA FLEMME

Vous trouverez ci-dessous la notice pour la prise de la flemme  :

Veuillez lire attentivement ces informations

- gardez cette notice, vous pourriez avoir besoin de la relire,
- si vous ressentez un quelconque effet désirable, parlez-en à vous-même et recommencez,
- ne parlez des bienfaits de votre flemme qu’aux personnes averties.

NOTICE

1 – qu’est-ce que la flemme ?

Cette action contient une substance active, la flemmagie qui est utilisée pour ne rien faire, on l’appelle aussi inertie.

2 – quelles sont les informations à connaître avant de prendre la flemme ?

- prévenir son entourage avant de commencer le traitement,
- éviter les gestes fatigants…

Mesures supplémentaires :

- rêvasser,
- faire de longues séances de transat,
- ouvrir un livre (il est recommandé de lire simplement un chapitre, pour ne pas se fatiguer),
- possibilité d’écouter en sourdine une musique douce.

3 – posologie de la flemme

une dose le matin a un bon effet pour la journée entière, si vous voulez prolonger, vous pouvez prendre une seconde dose qui fera effet la deuxième journée. La prise de la flemme n’a pas d’effet de dépendance, vous pouvez vous-même gérer votre flemme.

La prise de la flemme est propre à chaque individu.

Recommandations

Se lever tard le matin après 10 h de sommeil, se réveiller très lentement. Dès le lever, se mettre en mode lenteur pour le reste de la journée.

A 11 h, prendre son petit-déjeuner, en même temps, se caler sur les oreilles Léo ROJAS et sa flûte de pan. Feuilleter une revue, quelques pages du livre en cours. N’oubliez pas de bâiller longuement, d’étirer vos bras à l’infini.

Faire un tour dans le jardin, en peignoir, tester la température, les légumes qui poussent, s’asseoir au rebord de l’allée comme au rebord du monde qui s’est arrêté pour un temps, qui vous permet de faire le vide dans votre tête. D’arrêter pour un moment, le tourbillon.

Etre là, ne rien vouloir, ne rien demander. Entendre le murmure du monde à peine audible. Alors s’entendre. Rester encore un moment dans le jardin, caresser son chat, boule soyeuse.

Rentrer prendre une douche (non obligatoire) longue, apaisante, ne pas hésiter à enduire son corps d’une huile merveilleuse. Mettre son vieux jean et son vieux pull dont on arrive pas à se séparer, si confortables et aussi si symboliques. Pas besoin de se pomponner, le temps au naturel est bien là, le temps de sortir est révolu, le temps de plaire aussi. A l’arrêt du traitement, il faudra s’acclimater doucement.

Si la faim vous prend, consommez quelques salades de tomates, concombres, quelques fruits, un peu de fromage. Cuisiner n’est pas conseillé pendant le traitement de la flemme.

Si le temps vous le permet pratiquer de longues séances de transat en extérieur en rêvassant. Il est possible d’ agrémenter les séances par quelques lectures. Ecouter une musique douce et apaisante serait un plus.

En tant de flemme, penser au sport que vous pourriez faire sans en faire. Pour les plus atteints, faire une sieste. A 19 h autorisez-vous à boire un verre de Jurançon dans le transat accompagné de quelques radis du jardin. Vous n’oublierez pas d’applaudir à 20 h. Puis écoutez ce moment si spécial entre jour et nuit. Cette beauté saisissante qu’on reçoit en pleine figure.

Observez le soleil rougissant qui plonge dans la terre, rend les arbres noirs tels des spectres. L’horizon qui s’en va lentement. Le jour s’achève. Une petite pointe peut vous piquer, comme une angoisse de ne pas revoir le jour se lever.

Vous pouvez faire un plateau-repas, tourner quelques pages, écrire quelques maux, regarder la lune, les étoiles.

De toute façon la journée s’achèvera. Vous ressentirez un bien-être, un trouble, un regret, un abandon, un manque, la tristesse, la joie…

Il ne faut pas abuser de la flemme mais il faut l’utiliser régulièrement pour un bon résultat.
Laurence

J’étire ma flemme

Aujourd’hui
Envie de ne rien faire.

Rester au lit.
Le nez en l’air.
Rêvasser, somnoler,
entre mes draps réchauffée.
Oublier de repasser, balayer, nettoyer.
Peut-être manger
trop compliqué
simplement un thé parfumé
et du pain beurré.
Imiter le chat
se pelotonner,
s’étirer
pourquoi pas.
Peut-être aller s’asseoir au jardin
devant la bassin
regarder les poissons
faire des ronds
les poules
un peu maboules
les oiseaux
rigolos.
Aller me recoucher
pour la sieste respecter.
Enfin flemmarder
puisque je suis confinée.

Françoise

J’étire un sacré paquet de flemme dominicale.
Un dimanche a beau rentrer dans une suite logique,
il est une ile à lui tout seul, et l’éloge des grands espaces de liberté.
Ses rivages se gagnent, en bateau ou à l’aide de draps entortillés
comme des liens entrelacés aidant à l’évasion
du haut de nos fenêtres étroites.
J’ai loupé le passeur de dix heures.
La marée dérive dans un sens incertain.
La lune en goguette, caquette
Le soleil couché, voilé
Pas bougé, masqué
Un flot oscille
A un cil aussi
Au pays de Covidie.

Stéphane.