Samedi 2 mars 2019, premier atelier : MONOCHROMES

dimanche 3 mars 2019, par Frédérique Niobey

Quelques textes en appui à l’écriture

Une histoire de bleu de Jean-Michel Maulpoix
Je suis toujours à la recherche du bleu de Van Gogh
Voyelles et Alchimie du verbe de Arthur Rimbaud
Je suis né un jour bleu de Daniel Tammet

Une petite présentation de l’audition colorée de Sonia Delaunay

Avant d’aller à l’école de dessin découvrir les travaux des plasticiens

Et voici les TEXTES MONOCHROMES :

Bleus de gris

Éclats de blues, relents de bleu
Parfum de rien, sans saveur ni odeur
Marteau et clous
Froidure d’ardoise
poussières de cuivre oxydé
Éclat bleuté d’une lame d’acier trempé
Le sang bleu des Monarques
La veine qui palpite
La vie en bleu
Le regard bleu du père
sur ligne d’horizon
mêlé aux flots de mer
Une ancre bleue tatouée dans le creux
à l’encre bleue
Toutes voiles dehors
l’ombre bleue du grand cèdre
se détache sur l’azur
Caroline

Stridence du jaune

La lumière crie sur la terrasse aux murs crépis d’ocre acide.

Tout pique à cette heure du jour qui trouve à peine un peu de douceur à l’abri du patio.

Un enfant blond est assoupi dans un coin d’ombre

parcimonieuse où se berce doucement la paille de son hamac

pendu au citronnier. Les fruits brillent sur son sommeil fragile

et son oeil cherche par intermittence leur éclat immobile.

Dans une grande jarre d’argile verni les tournesols

se gorgent de feu.

C’est midi.

Antoinette

RESONNANCE DU VERT

Son regard était brusquement devenu du vert sombre de l’eau dormante des lacs et des étangs, d’un vert grave, apeuré, inquiétant même.
Quelques instants auparavant ses yeux étaient encore brillants d’espoir et d’enthousiasme, vert-menthe ou vert-émeraude, clairs, pétillants, frais, joyeux, remplis des éclats pointus de la mousse et des lichens qui s’étalaient en broderie élégantes sur le muret de son jardin. Des yeux vert-pomme qui chantaient à chacune de mes visites le printemps de Vivaldi, débordant de l’envie d’avoir encore envie malgré l’empilement des années qui avait eu raison de la virilité de son corps vieillissant. Toute son énergie était dans ce regard lisse et vernissé comme une feuille de palme, doux comme le vert soyeux de l’herbe des prairies normandes qui s’étalaient au loin.
Il avait dit alors que le chiffre 6 , apparu dans la conversation, avait revêtu la couleur verte, vert-kaki , vert-de-gris toxique, vert uniformes militaires allemands, vert de bombes éclatées, vert de Stukas, vert du bruit des bottes et des mitrailleuses, vert du 6 juin 1944, vert de mort.
Il avait dit alors que le chiffre 6 resterait vert à jamais.
Vert de l’Occupation.
Diable vert .
Vert de la guerre.
Vert de la peur.

Jacqueline

Été jaune

Je me souviens de ces vacances au bord de mer, de la maison aux murs cuivrés, ensoleillés, des tournesols géants qui, au soir couchant, devenaient de redoutables veilleurs.

Je me souviens de mon petit chapeau de paille naturelle et de ma robe mousseline assortie, vaporeuse, qui me faisait pousser des ailes.

Je me souviens du sable pâle tiède, crissant sous mes pieds menus, d’une jolie teinte dorée.

Je me souviens de ce pastel dans ma chambre, jardin printanier de crocus, jonquilles et primevères.

Je me souviens de mes expéditions solitaires au fond du grand champ, des abeilles butinantes,

de leur bourdonnement sourd et du goût du miel sur les crêpes fondantes de ma grand-mère.

Je me souviens...

Roselyne

AU VERT

J’ne dirai pas les mots verts
les mots qu’ont dit avec le fiel
vers rien vers nulle part
pas de mémoire en verre
pas de couleurs aux mots
ah si
Turlututu, 4 u, ça doit être un mot vert
entre caca d’oie et émeraude, mon vert navigue
la mer est-elle verte Envie vagues Envie baignades, l’éclate sans les morceaux
Ongles peints en vert mat pour conjuguer ethnique tenue et spartiates à talons aiguilles
J’espère une langue magnétique
Manti inventera un monde neuf
vers une identité pluri-elle

Geneviève

"Polychrome en jaunes"

Jaune citron, ocre jaune, jaune safran, jaune moutarde, jaune poussin, jaune pastel, jaune d’or...

Une palette de jaunes.

Les mains plongent, se lèvent, se posent, s’envolent, glissent en transe.

Chacun leur tour, par deux, par trois, les jaunes s’accrochent aux doigts, tâchent en dorures épaisses.

En doux mélange, les nuances inondent la toile... qui se cache.

Des coulures viennent en contraste.

Reflets, traits et paillettes dessinent un chant de lumière, enrubanné d’or.

Laëtitia

ROUGE JUSQU’A LA LIE

Marchant sous une pluie de confettis rouges,
je me dirigeai vers le lointain,
entre âme en peine
et bouillonnement à perdre haleine ;
prise par le flottement de mon intérieur,
et forte du désir de retrouver
le coquelicot des rêves de mon enfance.

Tel un chaperon perdu,
sillonnant le tracé rougeâtre,
guide de ma traversée,
il me plut respirer le parfum
d’un champ de roses.

Et,
m’enivrant jusqu’à la lie,
je me laissai emporter par le fil rouge de ma mémoire,
qui m’amena, sans détour,
jusqu’au coup de foudre de mon enfance.

Rouge le coquelicot.
Rouge mon souvenir.
Rouge la chaleur environnante,
et pas moins rouge,
l’état d’être qui m’habitait.

Rouge passé,
rouge présent,
et rouge de l’avenir (l’à-venir).
Du rouge sur ma palette,
que du rouge,
tout en nuances.

Nelly

Déclinaison en jaune

En ciré plutôt qu’en gilet

pas de maladie, pas d’étoile cousue, pas de cocu !

doigts colorés par le henné, le tabac, les carottes, la bétadine ?

du pâle au doré, du fluo à la moutarde

de la primevère aux genêts

de la rose pâle et parfumée aux jonquilles des sous-bois

citron pressé ou pamplemousse

sirop pour les enfants contre la toux ou les vers, bien bon le sirop !

riz au curry ou au safran, infiniment coloré, instantanément, sitôt l’épice saupoudrée

magie !

feu d’artifice

une lumière dans la nuit

éblouissement

aveuglant presque blanc

éruption d’un volcan

une flamme

un vol d’oiseau, un lever de soleil, un son clair et léger

la lumière éternelle

la vie, l’au-delà

l’infini …..........

Catherine

En VERT et controverse.
Vers le flot de ta mémoire verte,

c’est un toboggan que tu remontes dans le sens inverse autorisé.
Ce sont des bras que tu agites pour chasser, rêves flous et fous
qui t ’insupportent ; toujours de nuit comme pour ne pas être reconnus.
Ce sont des bras que tu agites pour voler, toujours du bas vers le haut.

Le vert émeraude brasse l’écume de mémoire et sonde l’oubli.
L’inévitable vert te déshabille du regard. L’éclat d’un oeil qui pleure.
Le vert fanfaronne et gagne toujours sur le marron.

Il foisonne, il plisse dans le vert, y décèle un brin de meurtrissure.
C’est un passage obligé, qui tente la guérison.
Tu en es sure, le vert chez toi est féminin,

l’autre vert bleuté : c’est du masculin.
Le vert roule du haut vers le bas, uniquement en montagne.
Le bleu, lui s’excuse toujours de descendre et de se voiler la face.
Le vert brille et mange le noir de l’iris.

C’est un mélange de glouglou et de serpentes aquatiques,
d’arrêts, de chutes et de buttés contre la roche irisée.

quand on ferme les yeux. Les mots « fuitent » en prose.
Et parfois en vers inespérés.
Stéphane .

Le vert colore le poème
Le vert change les saisons d’un trait de pinceau
Le vert sur l’oeil surligne, adoucit ou gronde le regard

Le vert fait chanter l’escargot
Le vert vocalise sous la rosée ou,
vibre sous le rayon de lune.

Vert jade
Emeraude

Rayon vert malachite
Translucide et veinée, Afrique oubliée.

Stéphane.

LE ROUGE :
« Mort ou Vif ! »

Le Rouge,
Que rien ne bouge,
Symbolise la Vie,
Et lui sourit...

Il coule dans nos veines,
Telle une rengaine,
Quand nous n’avons plus envie,
A cause de nos trop grands soucis...

Il m’agresse,
Et me transperce,
Telle une flèche,
Qui dans mon cœur rouge,
Bouge, bouge, bouge,
Bouillonne,
Comme une lionne,
Qui, sous le soleil couchant,
Ou le soleil levant,
Se réveille,
Se relève,
Sans aucune trêve...

« O » est rouge,
Rouge sang,
De lui, la vie dépend,
Vif,
Une gifle,
Incarnat,
Tel le trépas,
Écarlate,
Une claque...

« O » est musique,
Comme c’est fantastique,
Sur la portée,
Il est bien né,
Il musicalise le « do »,
Comme rond est le dos.


Il est chaud,
Quand il sort de mes veines,

Mais, ce n’est qu’une de-veine,
C’est comme un grand « Haut »,
Crié, du plus profond du Cœur,
Pour exprimer mon malheur,
D’être en vie,
Si vite,
D’avoir les genoux écorchés,
Après être tombée,
D’être à « Feu et à sang »,
Tout cela dépend,
Si je suis bien ou mal lunée,
Mais, ceci est un aparté...


Couleur du rubis,
Ou du coquelicot,
Quel beau joli mot,
Pour cette simple fleur,
Qui dans son malheur,
Ne vit pas plus d’une heure,
Quand on la cueille,
Alors que, elle,
Cette pierre,
C’est une rebelle,
Universelle,
« Dure », à jamais,
Même si elle est « polie ».

Ce rouge tomate,
N’est pas celui de « La serveuse automate »,
Pour être cerise,
Non pas grise,
Mais pleine de jus,
Ressemblant, parfois, à du pus...

Sur le corps crucifié,
Du Christ,
Elle se révèle exhaustive,
Non pas justifiée,
En son cœur,
Pour son plus grand malheur,
A ses pieds,
Ce n’est que pure vérité,
Et dans ses paumes,
Ça, c’est, vraiment, moins drôle...

Ce rouge tempête,
Dans ma tête,
M’agresse,
Lorsque je transgresse,
Tous ces sens interdits,
A la Vie,
Au dénie,
Voire à l’oubli.

Il fait preuve de corrections,
Afin de souligner que nous sommes parfois « cons »,
Que nous n’avons pas droit à l’erreur,
Car le rouge ne compte pas que pour du beurre.


Fabienne