Inscription d’un personnage dans la ville

lundi 18 mai 2015, par Frédérique Niobey

"Tu vivais dans une petite ville de banlieue, sans âme, sans histoire(s).
Caissière dans un supermarché, tu habitais un HLM miteux. Une grande tour de 11 étages, ou personne ne se connaît, ou tout le monde se croise. Une vie insipide.
La façade décrépie de ton immeuble, c’était le reflet de ton propre visage, vieille avant l’heure.
Les lumières artificielles et trop blanches des rayons, c’était aussi toi. Tu es devenue peu à peu invisible.
Ton travail, tu le faisais bien, les mêmes gestes répétés indéfiniment, à ton poste toujours à l’heure, confinée dans un espace d’à peine un mètre carré. Tes employeurs étaient satisfaits de toi.
Le soir, sur le parking déserté par les clients, tu reprenais machinalement et mécaniquement le chemin de ta voiture, telle un robot qui quitte une tâche pour en effectuer une autre, toujours aussi répétitive et ingrate.
La route du retour à la maison (façon de parler, d’une maison ce lieu n’avait pas grand chose) pénible et droite, parfois embouteillée par la file des véhicules des autres robots de cette ville, tu la connaissais par cœur, et tu pouvais la parcourir les yeux fermés. De toute manière il n’y avait rien à voir qui ait quelque intérêt."

Lisa

Tu es arrivée à la fin de l’été. Tu étais perdue. Tu ne connaissais personne. Tu demandais où se trouvait la préfecture, la mairie et on te donnait des noms de rue inconnue que tu ne pouvais pas situer. Il t’a fallu du temps pour te trouver des repères. Cette ville était si différente de celle que tu venais de quitter. Pas de gare, pas de rivière, pas de pont, pas de cathédrale. Elle te paraissait sans plan précis et te désorientait.

Tu as appris les quartiers, tu t’es félicité de l’existence de ses nombreux ronds-points qui te permettaient d’en faire deux fois le tour pour trouver la bonne direction. Il t’a fallu l’apprivoiser, connaître son histoire pour la comprendre et t’y intégrer.

Tu as beaucoup marché pour découvrir ses lieux insolites, ses coins cachés qui font son originalité, sa particularité. Le jardin public en terrasses, le parc idéal pour promener ton chien, La ruelle si étroite qu’on ne peut y avancer que l’un derrière l’autre. Et puis le clocher où tu es montée pour avoir une vue panoramique de cette ville aux toits d’ardoise qui t’accueillait.

Françoise